Impôts et quotient familial pour résidence séparée au 31 décembre

Jurisprudence
Fiscalité Impôt sur le revenu - IRPP

La déclaration des revenus de l'année 2017 de M. B est faite en imposition commune avec son épouse. La situation du couple évolue et Mme B a signé le 27 novembre 2017 un bail pour une maison d'habitation prenant effet au 4 décembre 2017.

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Contexte de l'affaire

La déclaration des revenus de l'année 2017 de M. B est faite en imposition commune avec son épouse.

La situation du couple évolue et Mme B a signé le 27 novembre 2017 un bail pour une maison d'habitation prenant effet au 4 décembre 2017.

Par une proposition de rectification l'administration a remis en cause l'imposition commune de M. B. et de son épouse au titre de l'année 2017, et a fixé son quotient familial à une part seulement.

Il s’en suit une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu pour un montant total de 51 829 euros.

L'administration fiscale a rejeté, la réclamation préalable formée par M.B.

M. B. a demandé au TA (Tribunal Administratif) de Châlons-en-Champagne de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu.
Le TA de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Il fait appel.

Sur la charge de la preuve, il appartient à l'administration d'apporter la preuve du bien-fondé de l'imposition distincte ou séparée de M. B.

Article 6 du CGI (Code Général des Impôts) : " 1. Chaque contribuable est imposable à l'impôt sur le revenu, tant en raison de ses bénéfices et revenus personnels (...) / Sauf application des dispositions des 4 et 5, les personnes mariées sont soumises à une imposition commune pour les revenus perçus par chacune d'elles et ceux de leurs enfants… / (...) 4. Les époux font l'objet d'impositions distinctes : a) Lorsqu'ils sont séparés de biens et ne vivent pas sous le même toit (...) ". Il résulte de ces dispositions que, dans le cas d'époux séparés de biens, le simple fait que les intéressés résident sous des toits séparés entraîne leur imposition distincte, dès lors que cette résidence n'a pas un caractère temporaire. »

Article 196 bis du CGI : " La situation dont il doit être tenu compte est celle existant au 1er janvier de l'année de l'imposition. Toutefois, l'année de la réalisation ou de la cessation de l'un ou de plusieurs des événements (), il est tenu compte de la situation au 31 décembre de l'année d'imposition ".


Pour estimer que l'épouse ne vivait plus sous le même toit que son époux au 31 décembre 2017 :

L’administration a pris en compte

- La signature le 27 novembre 2017 d'un bail pour une maison d'habitation à compter du 4 décembre 2017, ce qui présage d’une séparation.

- Des factures de gaz et d'eau faisant état de consommations à partir des 5 ou 6 décembre 2017, attestant d'une occupation effective du nouveau logement dès le début du mois.

- Une attestation de témoin attestant l'avoir aidée à déménager les 26 et 27 décembre 2017, soit avant la fin de l’année.

Pour M.B. :

  • Ce n'est que le 5 janvier 2018 que son épouse a annoncé partir vivre dans la maison qu'elle avait louée
  • Des mentions figurant sur le calendrier de paiement montrent qu'aucune consommation d'électricité n'est facturée au titre du mois de décembre 2017
  • Versement d’une attestation d'un proche indiquant avoir aperçu son épouse devant la télévision du domicile commun le 1er janvier 2018 à deux heures du matin

M.B. soutient que son épouse n'a annoncé partir vivre dans la maison louée que le 5 janvier 2018, après le 31 décembre 2017.

Le contrat de gaz a été ouvert le 6 décembre 2017, pour autant il n’est pas établi qu'il y a eu consommation à compter de cette même date.

Le contrat d'électricité a été ouvert le 5 janvier 2018.

D’où en l'absence d'électricité dans le logement de M.B. avant le 5 janvier 2018, « celle-ci ne peut être regardée comme y résidant déjà le 31 décembre 2017. »

De même, l'attestation d'un proche de Mme B. qui précise l’avoir déménagée les 26 et 27 décembre 2017 « ne permet pas d'établir qu'elle aurait vécu dans son nouveau logement dès cette date. »


En l’espèce, M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, le TA de de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Décide:

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 13 avril 2023 est annulé.
Article 2 : M. B... est déchargé de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu qui a été mise à sa charge au titre de l'année 2017.
Article 3 : L'Etat versera à M. B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
()

Cour de cassation du , pourvoi n°CAA de NANCY, 2ème chambre, 25/09/2025, 23NC02073, Inédit au recueil Lebon

Pour la remise en cause de l'imposition commune des époux, la preuve de la séparation de résidence doit être établie par l’administration fiscale, et ceci à la date du 31 décembre de l'année d'imposition. 

Il appartient à l'administration de prouver qu'ils vivaient séparément et pas au contribuable de prouver qu'il vivait encore avec son épouse.  

Pour la Cour, l'administration ne peut être regardée comme ayant établi que les protagonistes résidaient sous des toits séparés au 31 décembre 2017.