Réserve spéciale de participation : la question de la prise en compte des réductions et crédits d'impôt

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Le ministère du travail, de l'emploi et dialogue social a mis en ligne sur le site travail-emploi.gouv.fr, un guide de l'épargne salariale. Le calcul de la réserve spéciale ...

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Le ministère du travail, de l'emploi et dialogue social a mis en ligne sur le site travail-emploi.gouv.fr, un guide de l'épargne salariale. Le calcul de la réserve spéciale de participation est abordé. Le guide indique qu'il faut tenir compte des réductions et crédits d'impôt dans l'évaluation du bénéfice net dans la formule de calcul de la RSP. Cette précision est néanmoins contraire à la décision du Conseil d'Etat du 20 mars 2013.

La position du guide de l'épargne salariale

La réserve spéciale de participation est calculée suivant la formule légale suivante :

RSP = ½ (B – 5%C) x S / VA

Légende :

B : bénéfice net, C : capitaux propres, S : salaires bruts versés au titre de l’exercice, VA : valeur ajoutée.

On retient le montant du bénéfice net après imputation de l'impôt sur les sociétés. Le traitement des réductions et crédits d'impôt posent un problème dans la mesure où la doctrine et la jurisprudence s'opposent sur le sujet.

Le guide de l'épargne salariale précise les modalités d'imputation sur le bénéfice retenu dans la formule de la RSP des réductions et crédits d'impôts. Ces derniers doivent bien être déduits de l'impôt sur les sociétés retenu. Mais, en cas de déduction d'un impôt sur les sociétés théorique, les réductions et crédits d'impôt doivent également être retenus pour leur valeur théorique.

Guide de l'épargne salarial page 75

L’impôt sur les sociétés retenu pour le calcul de la réserve s’entend, en outre, après imputation de tous crédits ou réductions d’impôt afférents aux revenus inclus dans le bénéfice imposable au taux de droit commun.

Il en est ainsi notamment des crédits d’impôt recherche, famille ou pour dépenses de prospection commerciale prévus respectivement aux articles 244 quater B, quater F et quater H du CGI ou bien encore de la réduction d’impôt pour mécénat prévue à l’article 238 bis du CGI.

Les crédits d'impôt sont retenus pour leur montant effectivement utilisé, qu’ils aient été imputés ou restitués à l’entreprise, et dans la limite du plafond annuel auquel ils sont soumis le cas échéant.

Par ailleurs, il est souligné que le montant de ces crédits ou réductions d’impôt devant être imputé pour le calcul du bénéfice net ne correspond pas nécessairement à ceux effectivement utilisés. Ainsi, lorsque le montant de l’impôt théorique diffère de l’impôt sur les sociétés dû, il convient d’opérer une imputation théorique des crédits et réductions d’impôt. Pour ce faire, les entreprises devront procéder, le cas échéant, à un suivi de l’imputation de ces crédits ou réductions d’impôt propre au calcul de la réserve spéciale de participation.

Cette position du Guide reprend en partie celle de l'administration fiscale parue dans le  BOFiP (BOFiP-BIC-PTP-10-10-20-10-§ 200 et 210 du 15/03/2013). Selon cette doctrine, les crédits d'impôt, et notamment les crédits d'impôt recherche et le CICE sont à déduire de l'impôt sur les sociétés pour déterminer le bénéfice net. Ils sont retenus pour leur montant effectivement utilisé, qu'ils aient été imputés ou restitués à l'entreprise.

Une position contraire à la décision du Conseil d'Etat du 20 mars 2013

Nous rappelons que Conseil d'État dans sa décision du 20 mars 2013 a jugé que l'impôt sur les bénéfices dans le cadre de l'évaluation du bénéfice net de la formule de la RSP  ne peut tenir compte de la déduction de réductions ou crédits d'impôt.

Conseil d'Etat 20 mars 2013, n° 347633

Considérant que, pour l'application des dispositions de l'ancien article L. 442-1 du code du travail, reprises à l'article L. 3324-1 de ce code, l'impôt correspondant au bénéfice que l'entreprise a réalisé au cours d'un exercice déterminé, qui doit être retranché de ce bénéfice, ne peut s'entendre que de l'impôt sur les sociétés, au taux de droit commun, résultant des règles d'assiette et de liquidation qui régissent ordinairement l'imposition des bénéfices ; que, dans le cas où une entreprise bénéficie de crédits d'impôt imputables sur le montant de cet impôt, il n'y a pas lieu, par suite, de tenir compte du montant de ces crédits [...].

La position du Conseil d'Etat est à retenir

Dans la hiérarchie des sources de droit, la jurisprudence est placée au dessus de la doctrine. Légalement, c'est la position du Conseil d'Etat qui doit donc s'appliquer.

Les précisions apportées par le Guide de l'épargne salariale à propos des réductions et crédits d'impôt ne peuvent donc être utilisées qu'en cas de formule dérogatoire retenue par un accord. En effet, l’accord de participation peut prévoir une autre formule mais elle doit être au moins aussi avantageuse pour les salariés.

Nous rappelons que le projet de loi de finances rectificative pour 2013 prévoyait une disposition permettant de déduire les réductions et crédits d'impôt du bénéfice net, à l'exception du CICE. En effet, cette pratique augmente ainsi le montant de la RSP dont bénéficie les salariés. Néanmoins le Conseil constitutionnel a annulé cette disposition car elle n'a pas sa place dans une loi de finances.