Contexte de l'affaire
Les faits
Dans l’affaire dans laquelle le Conseil d’État a récemment eu à se prononcer, une SCI a fait l’objet d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle des rappels de TVA et des suppléments d’IS lui ont été signifiés. Le redressement s’est accompagné d’une majoration de 40% pour manquement délibéré. La SCI conteste cette majoration. Le tribunal administratif de Lille avait confirmé cette majoration. La cour administrative d’appel (CAA) de Douai a annulé ce jugement dans son arrêt du 2 mars 2023. Le ministre de l’Économie, des Finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation.
Le ministre s’appuie notamment sur le fait que le gérant de la SCI est aussi le dirigeant et l’unique associé d’une autre société ayant fait l’objet d’un contrôle fiscal ayant donné lieu à des rappels analogues de TVA puisque le redressement subi par la SCI concernait justement cette opération. Le dirigeant de ces 2 sociétés ne pouvant ignorer le premier contrôle fiscal sur l’autre société, ce dernier est selon le ministre coupable d’un manquement délibéré pouvant être sanctionné de la majoration de 40%.
La décision du Conseil d’État
Dans sa décision rendue le 25 octobre, la Cour de cassation rappelle que tant le principe de responsabilité personnelle que le principe de personnalité des peines s'opposent à ce que des pénalités fiscales, qui présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent, puissent être prononcées à l'encontre de contribuables lorsque ceux-ci n'ont pas participé aux agissements que ces pénalités répriment.
Toutefois, la Cour estime que ces principes ne s'opposent pas, pour l'appréciation du caractère délibéré du manquement reproché à une société, à ce qu'il soit tenu compte de la connaissance que son dirigeant peut avoir des règles fiscales dont la méconnaissance est sanctionnée ainsi que des faits caractérisant un manquement à ces règles.
L’administration fiscale peut ainsi établir le caractère intentionnel du manquement reproché à une société, en se fondant sur la connaissance que peut avoir son gérant de ce manquement, y compris lorsque cette connaissance résulte d'informations recueillies par ce gérant agissant en une autre qualité, comme celle de gérant d'une autre société.
En conséquence, la Cour de cassation casse la décision de la CAA de Douai et estime que la majoration de 40% était valable.
Source : Conseil d’État, 25 octobre 2024, n°473809
Commentaire de LégiFiscal
La majoration de 40% pour manquement délibéré peut être prononcée lorsqu’un dirigeant ne pouvait l’ignorer compte tenu de sa position de dirigeant dans une autre société cocontractante pour l’opération à l’origine de la majoration.