Contexte de l'affaire
CE 14 juin 2017 n°396901
En vertu de l'article 269 du CGI et de l'article L.131-31 du code monétaire et financier, la taxe sur la valeur ajoutée due à raison d'une prestation de service réglée par chèque par le client est exigible lors de la remise de ce chèque au redevable, dès lors que ce dernier est libre de l'encaisser immédiatement.
Dans le cas d'espèce, une société civile exerçant une activité de location d'immeubles à usage commercial et ayant opté pour la TVA, avait conclu un bail avec une société. En raison d'un litige avec son bailleur, la société locataire obtint du président du tribunal de grande instance de Troyes la consignation des loyers mensuels entre les mains du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de l'Aube, constitué séquestre. La cour d'appel de Reims ordonna la déconsignation de la somme des loyers ainsi consignés au profit du bailleur. Néanmoins, avant qu'elle ne soit versée à cette dernière, cette somme fit l'objet d'une saisie-attribution, à la demande de sa banque. Le bâtonnier de l'ordre des avocats de l'Aube remit un chèque, correspondant aux loyers déconsignés à un huissier de justice, qui, après imputation des frais d'huissier, émirent ultérieurement un chèque à l'ordre de la banque.
L'administration considéra que la remise du chèque à l'huissier de la banque rendait exigible la TVA relative aux loyers. Les juges du fond lui donnèrent raison, ce qui motiva la SCI à faire un pourvoi en cassation.
Le Conseil d'Etat rejeta le pourvoi de la société. En effet, pour lui, la société devait être regardée comme ayant encaissé ces loyers par l'effet du paiement de la somme correspondante par le bâtonnier de l'ordre des avocats en exécution de la saisie engagée par sa banque. Ce paiement avait rendu exigible la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces loyers et le fait que les sommes litigieuses avaient été saisies en vue du règlement d'une dette et qu'elles n'avaient, par conséquent, pas pu être librement employées par la SCI est sans incidence.
Extraits de l'arrêt
4. La cour administrative d'appel de Nancy a estimé que la société X devait être regardée comme ayant encaissé ces loyers à la date du 28 juillet 2009 par l'effet du paiement de la somme correspondante par le bâtonnier de l'ordre des avocats de l'Aube en exécution de la saisie engagée par la caisse du Crédit Mutuel. Elle en a déduit que ce paiement avait rendu exigible la taxe sur la valeur ajoutée correspondant à ces loyers et que, par suite, c'était à bon droit que l'administration avait mis celle-ci à la charge de la société X. En statuant ainsi, la cour, qui n'a pas commis d'erreur de droit en regardant comme sans incidence à cet égard la circonstance que les sommes litigieuses avaient été saisies en vue du règlement d'une dette et qu'elles n'avaient, par conséquent, pas pu être librement employées par la société X, n'a pas méconnu les dispositions du c du 2 de l'article 269 précité du code général des impôts, peu important la date à laquelle le saisissant a lui-même appréhendé les sommes saisies.
5. La société requérante soutient que la cour a jugé que la saisie-attribution avait pour effet, dans la limite de son montant, d'éteindre sa dette à l'égard de la caisse du Crédit mutuel et a, ce faisant, relevé d'office un moyen sans inviter les parties à présenter leurs observations, commis une erreur de droit en s'abstenant de vérifier que les sommes saisies avaient bien permis au cas d'espèce d'éteindre une dette et, dans le cas où elle aurait procédé à cette vérification, dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis. Toutefois, en jugeant que la saisie avait eu pour effet, dans la limite de son montant, d'éteindre la dette de la société Y, tiers saisi, à l'égard de la société X, la cour, qui s'est bornée à répondre à un moyen dont elle était saisie, n'a ni commis d'erreur de droit ni dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.
Commentaire de LégiFiscal
La saisie ayant éteint la dette du contribuable, celle-ci vaut disposition des sommes saisies et rend exigible la TVA relative aux prestations de services afférentes à ces sommes.