Non déclarations des trusts: inconstitutionnalité des amendes de 12,5% et 5%

Cour de cassation du , arrêt n°2016-618

Cons. const. n° 2016-618 QPC du 16 mars 2017  L'administrateur d'un trust dont le constituant ou l'un au moins des bénéficiaires a son domicile fiscal en France ou qui comprend ...

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Contexte de l'affaire

Cons. const. n° 2016-618 QPC du 16 mars 2017 

L'administrateur d'un trust dont le constituant ou l'un au moins des bénéficiaires a son domicile fiscal en France ou qui comprend un bien ou un droit qui y est situé est tenu d'en déclarer la constitution, le nom du constituant et des bénéficiaires, la modification ou l'extinction, ainsi que le contenu de ses termes (article 792-0 bis du CGI)

 L'administration peut appliquer une amende forfaitaire de 20 000 € ou une majoration égale à 12,5% des biens, droits et produits capitalisés (si son montant est plus élevé) depuis le 8 décembre 2013 si cette obligation de déclaration n'est pas respectée, en vertu des dispositions de l'article 1736 du CGI. L'amende était de 10 000 euros et la majoration, de 5% avant cette date.

 En l'espèce, la requérante soutenait que ces pénalités méconnaissent le principe de proportionnalité des peines et d'égalité devant la loi garantis par les articles 8 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

 Le Conseil d'Etat considéra que la question de constitutionnalité posée présente un caractère sérieux et la renvoya devant le Conseil constitutionnel.

 Le Conseil juge que l'amende proportionnelle (12,5 et 5%) est contraire à la Constitution, car elle n'est pas plafonnée et est manifestement disproportionnée à la gravité des faits.

En revanche, l'amende forfaire de 10 000 ou 20 000 euros est conforme à la Constitution. En effet, celle-ci n'est pas manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu'a entendu réprimer le législateur, compte tenu des difficultés propres à l'identification de la détention d'avoirs, en France ou à l'étranger, par le truchement d'un trust. Elle permet ainsi de lutter contre la fraude fiscale.

Extraits de l'arrêt

8. En prévoyant une amende dont le montant, non plafonné, est fixé en proportion des biens ou droits placés dans le trust ainsi que des produits qui y sont capitalisés, pour un simple manquement à une obligation déclarative, même lorsque les biens et droits placés dans le trust n'ont pas été soustraits à l'impôt, le législateur a instauré une sanction manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu'il a entendu réprimer. 

9. Dès lors, les mots « ou, s'il est plus élevé, d'un montant égal à 5 % des biens ou droits placés dans le trust ainsi que des produits qui y sont capitalisés » figurant au paragraphe IV bis de l'article 1736 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 2011 ainsi que les mots « ou, s'il est plus élevé, d'un montant égal à 12,5 % des biens ou droits placés dans le trust ainsi que des produits qui y sont capitalisés » figurant au même paragraphe IV bis, dans sa rédaction résultant de la loi du 6 décembre 2013 doivent être déclarés contraires à la Constitution, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs dirigés contre ces dispositions. 

10. En second lieu, d'une part, en punissant d'une amende forfaitaire, fixée, selon la version des dispositions contestées, à 10 000 ou 20 000 euros, chaque manquement au respect des obligations déclaratives incombant aux administrateurs de trusts, le législateur a, s'agissant d'informations substantielles et du manquement à une obligation déclarative poursuivant l'objectif de lutte contre la fraude et l'évasion fiscales, instauré une sanction dont la nature est liée à celle de l'infraction. L'amende forfaitaire, même en cas de cumul, n'est pas manifestement disproportionnée à la gravité des faits qu'a entendu réprimer le législateur, compte tenu des difficultés propres à l'identification de la détention d'avoirs, en France ou à l'étranger, par le truchement d'un trust. 

11. D'autre part, l'amende forfaitaire s'applique à chaque manquement aux obligations déclaratives prévues par l'article 1649 AB du code général des impôts. Pour chaque sanction prononcée, le juge décide après avoir exercé son plein contrôle sur les faits invoqués, manquement par manquement, et sur la qualification retenue par l'administration, soit de maintenir l'amende, soit d'en décharger le redevable si le manquement n'est pas établi. Il peut ainsi adapter les pénalités selon la gravité des agissements commis par le redevable. Par suite, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe d'individualisation des peines. 

Cour de cassation du , arrêt n°2016-618

Commentaire de LégiFiscal

Cette décision ne peut être invoquée dans les instances jugées définitivement à la date de sa publication, c'est à dire le 17 mars 2017.

En outre, la loi de finances rectificative pour 2016 supprime la majoration de 12,5% et prévoit en contrepartie une majoration égale à 80% des rappels d'impôt relatifs aux biens attachés à un trust non déclaré.